![]() ![]() |
UB- Préhistoire Le site de Préhistoire de l'Université de Bourgogne Université pour Tous - Bourgogne UTB - Auxerre |
||||||||||||||
![]() |
|||||||||||||||
![]() |
|||||||||||||||
|
|||||||||||||||
![]() |
|||||||||||||||
![]() |
|||||||||||||||
UTB - Auxerre : Conférence
Version PDF téléchargeable et imprimable du texte de la conférence
|
![]()
Bonjour à toutes et à tous, Dans le cadre des conférences de l’UTB-Auxerre, j’ai proposé de vous parler d’archéologie et précisément de la fin, de la toute fin de la Préhistoire. Cette période que l’on appelle le Néolithique est généralement moins représentée et racontée au public que la Préhistoire ancienne des grottes ornées du Paléolithique supérieur par exemple. Lorsque cette période est représentée, parfois, il faut bien remarquer que cela n’est pas très réussi. En témoigne la sortie récente du film 10000 qui présente un certain nombre d’anachronismes assez évidents (chasseurs de mammouths et pyramides égyptiennes) et catastrophiques pour ceux qui ne connaissent rien de la préhistoire. C’est ce que je vais essayer de vous montrer aujourd’hui, au travers de quelques images. Vous verrez que ce que l’on appelle encore la Préhistoire (que l’on dit récente) n’est de la Préhistoire que parce qu’on ne dispose pas de source écrite, mais qu’en réalité le fonctionnement des sociétés néolithiques, les évènements historiques qui se succèdent se rapportent plus à l’histoire de l’antiquité archaïque qu’à celle des chasseurs du Paléolithique qui boulottent de la viande crue, habillés en peau de bête à l’entrée d’une grotte. Chronologiquement tout d’abord. La période dont je vais vous parler, si elle est dite préhistorique est en réalité très récente. Représenter le temps préhistorique a toujours été un problème parce que la Préhistoire, c’est très long. Alors, il existe ce type de représentation… Et puis il existe ce type là, où on a rapporté la Préhistoire à un an… Si vous vous souvenez de Lucy, ce charmant petit hominidé appartenant à la famille des Australopithecus Afarensis, découverte en Ethiopie en 1974, par Yves Coppens et son équipe. Elle est datée d’environ 3,5 MA initialement et maintenant je crois plus précisément à 3,15 MA et nous allons tricher un peu et lui accorder 3 650 000 ans, que nous pouvons rapporter facilement à 365 jours. Donc si Lucy occupe dans cette petite histoire le 1er janvier à 0H00 et nous même le 31 décembre à minuit, considérez que les premiers outils ne sont apparus que le 24 juin, les premières grottes ornées le 29 décembre et la poterie, qui va marquer dans de nombreuses régions la néolithisation, le 31 décembre au matin. J’espère que cette petite pirouette vous a montré la durée de l’histoire humaine déjà écoulée et l’extrême jeunesse du Néolithique au sein de cette longue histoire. Le Néolithique ou âge de la pierre polie est une période de la fin de la Préhistoire qui n’a été reconnue qu’autour de 1865, alors qu’en réalité ce sont des objets du Néolithique, en particulier des haches polies qui ont attiré l’attention d’un certain nombrer de savants, dès le XVIIe et le XVIIIe siècle sur l’existence d’une humanité antédiluvienne… la Préhistoire. Et ce n’est en fait qu’au début du XXe siècle, dans les années 20, que le concept de néolithisation ou de révolution néolithique a été réellement compris, principalement par un archéologue australo-britannique : Vere Gordon Childe. Le concept de néolithisation : C’est tout d’abord une série d’innovations, d’inventions qui vont constituer des progrès décisifs dans l’histoire de l’humanité. Il s’agit tout d’abord, par ordre d’importance, de l’apparition de l’économie de production : Cela veut dire, d’une part, la domestication des plantes avec le développement de l’agriculture. D’autre part, la domestication des animaux avec le développement de l’élevage. Ce qui est très important c’est donc que l’homme va à partir de ce moment, non plus prélever sa nourriture sur le milieu comme ces ancêtres chasseurs, pêcheurs, collecteurs, mais la produire et la contrôler, donc rapidement obtenir des excédents et les thésauriser. Attention à un raccourci un peu trop rapide, le passage à l’économie de production avec l’agriculture et l’élevage n’empêchera jamais les hommes de continuer à chasser, à pêcher ou à ramasser des fruits et des plantes sauvages… jusqu’à nos jours. Mais ces activités deviennent peu à peu des activités d’appoint, ou sociales et plus une réelle nécessité. Ces deux innovations vont généralement en entraîner d’autres ou être liées à d’autres en réalité, car les liens de causalité ne sont pas toujours évidents. La première que je mentionnerai est la sédentarité, c'est-à-dire que les hommes se fixent généralement à ce moment en un lieu unique ou autour de ce que l’on va appeler une « résidence principale ». En effet, les chasseurs-collecteurs étaient par nature nomades, suivant les troupeaux et plus généralement les ressources à travers des parcours pouvant avoir des dimensions très variables. Avec le Néolithique, le développement de l’agriculture (semer des graines, entretenir les champs et attendre les récoltes) va nécessiter de se fixer à proximité de ces champs. C’est donc le moment du développement de petits hameaux puis de villages. Une autre innovation importante, va être le développement de la céramique, la terre cuite donc qui va constituer le matériau de prédilection pour la fabrication de récipients. Ces récipients devenant nécessaires pour le stockage mais aussi la consommation de la nourriture. Vous n’avez qu’à essayer de manger une bouillie de céréales sans un bol et vous comprendrez rapidement. Enfin, la nécessité d’aménager des champs pour pratiquer l’agriculture amène à une autre innovation intéressante même si elle est secondaire par rapport aux premières que je vous ai mentionné, qui est le polissage de la pierre. Cette technique permet d’obtenir des lames de hache d’une solidité bien supérieure à la lame taillée de silex pour abattre les arbres, on dit essarter, et créer ainsi des champs. Ce sont donc les 5 points importants de la définition du Néolithique :
Si nous ne pouvons pas dire que nous sommes encore au Néolithique, nos civilisations, nos sociétés sont directement issues de cette économie et de ces techniques. En réalité jusqu’au XIXe siècle et même jusqu’au milieu du XXe siècle dans certaines de nos campagnes, les modes de vie de nos grands parents ou arrières-grands parents n’étaient pas très différents de ceux des hommes du Néolithique. C’est pour cela que l’on peut dire, en suivant le Professeur Jean Guilaine qui est un des grands spécialistes du Néolithique en Europe que nous sommes les enfants du Néolithique. Pour compléter cette définition et en revenant sur les questions de chronologie, soulignons que ce changement très important des modes de vie, va se faire dans les foyers d’invention en plusieurs millénaires, cela n’apparaît pas d’un seul coup de baguette magique, et par exemple au Proche Orient qui est l’un des foyers primaires les plus anciens de Néolithisation, il se passe près de 5000 ans entre le moment où les hommes se fixent en villages sédentaires et le moment de l’invention de la céramique, moment où seront réunis les 5 éléments qui définissent le Néolithique. Dans les régions où le Néolithique s’est diffusé à partir d’un foyer primaire, évidemment les traditions néolithiques peuvent arriver toutes constituées, apportées par des colons, nous y reviendrons. Ce que vous devez retenir, c’est à la fois qu’il s’agit d’un phénomène progressif, une invention en entraînant une autre… pendant plusieurs millénaires et qu’en même temps, l’expression de « Révolution Néolithique » proposée par l’archéologue Vere Gordon Childe, dès les années 1920, n’est quand même pas fausse, car 5000 ans par rapport à plusieurs millions d’années d’évolution, c’est quand même une révolution. Il existe donc en réalité plusieurs foyers de néolithisation sur la planète. Le Néolithique n’est en aucun cas une invention unique, mais au contraire un semi de petites innovations dans des régions parfois très éloignées et à partir desquelles l’économie néolithique va se diffuser à de très vastes régions. Pourquoi une évolution similaire s’est elle produite en plusieurs points de la planète ? En fonction des connaissances actuelles, Les innovations qui font le Néolithique ont été rendues possibles par une amélioration climatique qui a concerné l’ensemble de la planète à l’issue de la dernière glaciation… En même temps, des glaciations, il y en a déjà eu un certain nombre et donc autant de période interglaciaires d’améliorations climatiques. Et pourtant ces innovations ne se sont pas produites plus tôt pendant la Préhistoire. Il faut alors penser que la néolithisation, rendue possible par cette amélioration climatique globale est aussi liée à un état général d’avancement des techniques ou des sociétés humaines. Le débat sur le pourquoi de ce phénomène est encore loin d’être clos. Conséquence de l’existence de ces multiples foyers : la néolithisation pris des formes différentes sur les différents continents. Différences qui concernent autant les espèces animales et végétales qui vont être domestiquées (évidemment, en fonction des animaux présents localement à l’état sauvage) mais différence aussi dans l’ordre d’apparition de ces différentes innovations qui font le Néolithique. Ces foyers demeurent encore largement méconnus, à part peut-être le foyer proche-oriental que nous verrons tout à l’heure. Ces foyers primaires sont connus sur tous les continents. En Afrique, il se situe en plein cœur du Sahara dans l’Aïr et le Hoggar (qui n’étaient pas des zones désertiques à l’époque), en Asie, certains développements sont probables en Inde, mais c’est surtout en Chine que les innovations seront les plus précoces. Plusieurs foyers aussi sur les continents américains, en Amazonie, dans les Andes et au Mexique actuel. Quelques autres régions ont connu des développements particuliers après la dernière glaciation, avec des inventions importantes mais partielles, comme si le processus de néolithisation y avait commencé mais avait été rattrapé par l’arrivée de colons déjà néolithiques en provenance d’autres régions aux développements plus anciens. Au Proche Orient, la néolithisation va concerner ce qu’on a donc appeler le croissant fertile. Evidemment, dans ce grand territoire, le climat et l’environnement sont différents et les grandes modifications climatiques de la période ne produisent pas les mêmes effets d’une région à l’autre. Le processus de la néolithisation s’étend sur près de 5000 ans à partir de ce premier moment d’amélioration climatique post-glaciaire, grosso modo à partir de 12000 avant notre ère. On distingue 4 grandes étapes dans ce long processus de néolithisation : La première période de ce long processus est datée de 12000 à 10300 avant notre ère. Cependant, avec l’amélioration climatique qui débute, les ressources disponibles dans l’environnement proche vont se multiplier, en même temps que le couvert végétal et par voix de conséquence, les animaux. En marge de ce changement important, on voit se développer des outils qui traduisent une exploitation plus importante qu’avant des ressources végétales (des couteaux à moissonner, des meules et des mortiers, une vaisselle de pierre…). Et cela dans une période où l’on sait que se développent les céréales sauvages en grands champs spontanés, naturels pour le moment. D’autres changements accompagnent ces phénomènes au niveau des symboles, des sépultures… nous y reviendrons ultérieurement. La deuxième étape est datée de 10300 à 8800 avant notre ère. Ce n’est pas la mieux connue et bien évidemment, c’est la période cruciale dans laquelle beaucoup d’évolutions vont se produire. L’essentiel des traditions de la période précédente se poursuivent, mais on voit apparaître de nouveaux éléments comme les haches de pierre polie qui témoignent généralement d’essartages, de l’abatage de la forêt. Ces domestications et donc l’élevage et l’agriculture sont attestés dans la troisième étape, entre 8800 et 6900 avant notre ère. Je ne détaille pas ici l’évolution de la culture matérielle, des modes de vie… Mais autour de 8300 à 8000, plantes et animaux domestiques apparaissent. Assez rapidement dans diverses régions pour les plantes et au départ au nord de la région, à la frontière Syrie-Turquie pour les animaux. J’y reviendrai en détail la semaine prochaine, mais nous voyons là se développer à la fois des céréales et des légumineuses domestiques et les quatre espèces d’ongulés du Proche Orient (des animaux à sabots donc) : des moutons et des chèvres, des bœufs et des porcs. Ce développement de l’économie de production accompagne de profondes transformations de la société, nous aurons là de véritables petites villes, des sanctuaires, des échanges à longue distance… Il faut encore attendre le début de la quatrième étape à partir de 6900, pour observer le réel développement de la dernière des innovations qui composent la définition du Néolithique. Il s’agit de la céramique. Celle-ci va apparaître très rapidement dans plusieurs régions et elle semble d’emblée assez sophistiquée, soignée tant techniquement que stylistiquement, ce qui témoigne sans doute d’essais plus anciens. A partir de cette époque, on va observer un double phénomène, d’une part, la région initiale de ces changements va connaître des troubles. Les grands villages du Levant disparaissent, abandonnés, incendiés et la belle société mise en place semble s’effondrer. Dans le même temps, on va voir se développer de nouvelles civilisations dans les régions voisines, à la fois à l’est en Mésopotamie et au nord en Anatolie (en Turquie actuelle). En réalité, les premières colonisations néolithiques remontent à la période précédente, puisque l’île de Chypre est atteinte dès 8400-8300 par des populations du Proche Orient qui apportent des espèces animales et végétales domestiques… En direction de l’Europe, le mouvement s’amorce à partir de la Turquie essentiellement dès 6800 avant notre ère, vers la Grèce tout d’abord, en plusieurs phases de colonisation et d’implantation. A partir de la Grèce, vers 6100 avant notre ère, deux grands mouvements vont s’amorcer et répandre le mode de vie néolithique à travers l’Europe. Le premier, et le plus rapide est le courant méditerranéen qui va déplacer des populations néolithiques jusqu’en Méditerranée occidentale et au-delà puisque le détroit de Gibraltar sera franchi dès 5600. Il est caractérisé par des groupes qui utilisent de la céramique à décor imprimé. Le second, plus lent mais peut-être plus profond, remonte au travers des Balkans et va traverser toute l’Europe continentale en suivant le cours du Danube vers le nord-ouest jusqu’à la France et au bassin parisien entre 5300 et 5000. Ce courant que l’on appelle danubien est marqué lui par des céramiques à décors linéaires ou rubanés très caractéristiques. L’Europe sera presque entièrement passée au mode de vie néolithique à partir de cette époque mais il faut encore attendre pour que ce mouvement touche les régions les plus septentrionales et les îles britanniques au début du quatrième millénaire, vers 4000. Les processus de ces diffusions sont assez complexes, entre réelles colonisations très rapides et expansions démographiques progressives, avec une part variable des populations indigènes qui accueillent plus ou moins bien les nouveaux venus et leurs traditions. Cette diffusion à large échelle et les différentes situations rencontrées, les populations indigènes, les contextes de ces contacts etc. vont amener très tôt à l’apparition de cultures matérielles et de traditions assez marquées, mais en même temps les deux grands ensembles l’un au nord en Europe centrale et septentrionale, l’autre au sud en Méditerranée occidentale, demeurent remarquablement homogènes dans presque tous les domaines (la culture matérielle, les types d’animaux et de plantes élevés, les formes de l’habitat comme les pratiques funéraires). Mais ces deux grands ensembles culturels n’ont qu’un temps et très vite, ils vont se désagréger entre 4900 et 4700 avant notre ère. En Europe occidentale, c’est en quelques sortes une première « période intermédiaire » qui va être marquée par le développement de cultures archéologiques de moindre ampleur géographique et, il faut bien le dire, encore méconnues. C’est ce moment qui marque la transition du Néolithique ancien au Néolithique moyen. Après cette « phase intermédiaire » et dès 4700-4500, on assiste à une recomposition culturelle importante avec le développement à nouveau de grands ensembles culturels et en même temps à la diffusion du Néolithique vers les dernières zones marginales de l’Europe septentrionale. Le Néolithique moyen est le moment du « plein Néolithique » ou l’économie de production semble totalement aboutie. Pourtant, c’est aussi un moment de transformation profonde des sociétés. J’ai l’habitude de dire, mais c’est sans doute un abus de ma part, que lorsque les colons néolithiques sont arrivés au bout de l’Europe, à l’extrême occident, ne pouvant plus gagner de nouvelles terres à exploiter, ils ont probablement connu des crises et ont été contraints d’évoluer de transformer leurs sociétés. Alors, ce n’est peut-être, sans doute, pas si simple, mais c’est le moment où la société va effectivement se transformer en Europe occidentale. Trois phénomènes liés peuvent être mentionnés : Le premier est sans doute l’apparition de grands travaux collectifs, de diverses natures (pour l’habitat, pour les tombes) qui vont mettre en jeu probablement toute la population d’un village et peut-être même nécessiter le travail commun de plusieurs villages. Le second c’est de développement à ce moment de la monumentalité et d’une monumentalité exacerbée qui va prendre des formes variées. Le troisième, c’est une transformation importante dans les rites funéraires avec le passage à la sépulture collective, qui s’opposent aux traditions anciennes des colons néolithiques de la sépulture individuelle réunie ou non en nécropole selon les régions. Les grands travaux, c’est l’action du groupe, de la communauté. Alors, sans rentrer dans les détails, et pour vous montrer quelques exemples, c’est le moment du développement de la monumentalité donc qui va prendre des formes variées avec le mégalithisme que vous connaissez tous, mais qui débute probablement avec d’autres formes. Non loin d’ici les monuments funéraires du groupe de Cerny, principalement connus dans la vallée de l’Yonne en sont un très bel exemple. La monumentalité et le mégalithisme recouvrent des choses très diverses qui vont se développer principalement au nord-ouest de l’Europe, en Bretagne et dans les îles britanniques avant de se répandre à une bonne part de l’Europe, mais qui semble aussi se développer peut-être de façon autonome en Méditerranée occidentale, comme dans d’autres régions du monde. Cette monumentalité qui se développe dès la seconde moitié du Ve millénaire, va se poursuivre tout au long du Néolithique jusque au tournant du IIIe millénaire où elle atteindra probablement son paroxysme. En voici quelques exemples en images. Du IVe au IIIe millénaire, un autre phénomène va se développer de façon inédite en Europe. Ce sont d’une part les gravures rupestres dont les figures nous montre un monde bien plus complexes qu’on ne l’imaginait il y a encore quelques temps. Et d’autre part des représentations humaines à la fois sous la forme de très très nombreuses figurines mais aussi dans une statuaire de grande taille : stèles et statues-menhirs Un dernier phénomène très important va caractériser cette période néolithique, dès la seconde moitié du Ve millénaire avant notre ère, donc entre 4500 et 4000 avant notre ère… Pendant ce temps, à l’autre bout du continent, là où tout avait commencé pour la néolithisation de l’Europe, dans les Balkans, c’est la métallurgie qui se développe, très rapidement. La métallurgie du cuivre et de l’or qui va contribuer à transformer durablement les sociétés néolithiques. Le plus bel exemple connu est la nécropole de Varna, sur la mer Noire en Bulgarie. Et ce développement précoce aura des répercussions sur les sociétés néolithiques de nombreuses régions de l’Europe plus ou moins rapidement. On retrouvera des éléments en or très anciens mais toujours très rares jusqu’en France… En Europe de l’Ouest, malgré quelques contacts avec les régions balkaniques, la métallurgie se développe plus tardivement, après la fin des grandes cultures du Néolithique moyen et une nouvelle « période intermédiaire » entre guillemets qu’on appelle le Néolithique récent. Mais on ne verra plus d’aussi grandes cultures se développer. Les nouvelles aires culturelles sont généralement régionales voire micro-régionales. C’est au début de ce Néolithique final, que la métallurgie va réellement apparaitre en Europe occidentale dans quelques foyers essentiellement méditerranéens en Italie et en Espagne, dans la seconde moitié du IVe millénaire, Au début du IIIe millénaire, les grandes cultures de l’âge du cuivre balkanique disparaissent peut-être en raison de l’épuisement des filons de cuivre. C’est alors la Péninsule Ibérique qui va prendre le relais avec le développement de cultures très riches et dynamiques en lien avec la métallurgie du cuivre. Cela se passe surtout dans le sud, en Andalousie et au Portugal. Dans ces régions, on va voir apparaître de véritables sites fortifiés (les enceintes existent en réalité depuis le début du Néolithique, mais jamais comme celles-ci). Qui vont se développer à grande vitesse, jusqu’à ce que chaque colline connaisse son petit château fortifié avec ses fortins tout autour etc. Et c’est sans doute à partir de la Péninsule Ibérique et du Portugal en particulier que va se produire le dernier des grands phénomènes de la période, mais probablement l’un des plus étonnants : le phénomène campaniforme. Je vous ai dit tout à l’heure que l’Europe occidentale, était alors morcelée en petite cultures régionales ou micro-régionales. En Europe centrale au début du IIIe millénaire on voit se développer de nouveau un grand ensemble culturel que l’on appelle la civilisation Cordée, mais en Occident, les cultures ne semblent rayonner que sur quelques dizaines de kilomètres. Au milieu du IIIe millénaire, vers 2500, et probablement à partir du Portugal, Les campaniformes vont rayonner probablement par voie maritime à la fois vers les côtes atlantiques françaises en remontant vers le nord et vers la Méditerranée occidentale. J’ai étudié ce phénomène en France méditerranéenne et j’ai pu montrer que des groupes sans doute restreints vont s’installer le long des côtes et aux embouchures et le long des fleuves sur des sites très particuliers, souvent perchés et naturellement protégés mais quand même au contact des populations indigènes. C’est à partir de ces sortes de comptoirs qu’ils vont diffuser des objets de leurs propres traditions vers les populations indigènes et vers l’intérieur des terres. Evidemment ils ne vont pas s’arrêter sur les côtes mais au contraire poursuivre leur exploration du continent européen… Cette formidable diffusion campaniforme à travers l’Europe est sans doute très compliquée mais on peut y observer deux choses importantes : Tout d’abord, ils ont ouvert des voies de communication à travers tout le continent et on va voir des relations se développer entre des régions très éloignées qui vont développer des traditions communes. Ensuite, les campaniformes semblent avoir diffusé la pratique métallurgique à de nombreuses régions qui ne connaissaient souvent que de rares objets en métal échangés avec d’autres cultures. C’est ce phénomène dont les effets se font sentir jusqu’au tournant du millénaire dans de nombreuses régions, entre 2000 et 1800 avant notre ère, qui fait basculer l’Europe occidentale dans l’âge du Bronze avec le développement de ce qu’on appelle les sociétés du métal. C’est d’ailleurs dans la dernière phase de ce Campaniforme que les premiers objets en bronze arrivent en France. Nous sommes donc arrivés ici à la fin du Néolithique. Pour terminer je voudrais attirer votre attention sur trois points qui me semblent importants : Le premier c’est que cette économie de production qui marque le Néolithique, avec toutes les modifications techniques et sociales qu’elle entraine va être un véritable engrenage. On peut en effet observer que les régions de néolithisation ancienne, ces foyers primitifs sont aussi ceux qui connaitront à la suite les développements les plus importants, le développement de la métallurgie, la révolution urbaine, le développement des comptes, de l’écriture, de l’Etat… tout ce qui a fait les Civilisations de l’Antiquité que vous connaissez. Le second c’est que c’est quand même un curieux choix qui a été fait par les hommes à un moment donné. Mais n’oubliez cependant pas que ce mode de vie néolithique, celui de la sédentarité et de l’économie de production n’est pas un modèle unique, obligatoire dans l’histoire des populations humaines et qu’il reste ou qu’il restait il y a peu des groupes humains pratiquant le nomadisme, des chasseurs-collecteurs donc… Et peut-être même des chasseurs collecteurs heureux. Le troisième point que j’évoquais en fait dès l’introduction, c’est une interrogation. Je vous remercie de votre attention. Je vous ai mis ici quelques indications afin de prolonger cette conférence par des lectures et éventuellement en vous connectant au site web que j’ai développé pour les étudiants en Préhistoire de l’Université de Bourgogne et qui propose des cours en ligne (détaillés ceux là), des liens, des informations, des conseils de lecture… Et c’est gratuit évidemment.
Pour en savoir plus : Un petit livre illustré : Un poche : Un roman : Un site web : http://ubprehistoire.free.fr/ Version PDF téléchargeable et imprimable Me contacter : olivier.lemercier@u-bourgogne.fr |
||||||||||||||
![]() |
|||||||||||||||